France : le bon élève de l’environnement ! edit
Dans une singulière indifférence en France, l’université de Yale a publié son classement 2010 des pays pour leur performance environnementale. Alors que notre pays ne se sort pas toujours très bien de ces classements internationaux, la surprise vient de son excellente place : sur 163 pays, la France se place 7e. Mieux encore, sur l’ensemble des pays du G20, elle est en tête. En ces temps marqués par le doute sur la nécessité ou l’intérêt de mener une politique environnementale ambitieuse, cette bonne place est réconfortante et devrait plutôt encourager des efforts en montrant qu’ils sont efficaces.
Certes, on pourra trouver que les indicateurs retenus pour établir ce classement sont incomplets ou arbitraires. Ceci n’est d’ailleurs pas contesté par les chercheurs ayant établi ce classement mondial qui soulignent que de nombreuses données doivent être affinées. De même que pour le calcul de l’empreinte écologique, la question de la sélection des critères et leur pondération joue un rôle crucial. Comme pour chaque classement de ce type, il est probable que l’on peut aboutir à des résultats sensiblement différents en modifiant ces choix. Cependant, le classement est loin d’être arbitraire et repose sur le résultat de plusieurs années de recherches menées en collaboration avec des experts du monde entier. Par ailleurs, le champ couvert par ces études est suffisamment large pour prendre en compte l’ensemble des politiques environnementales en évitant de se focaliser sur un seul secteur. Dès lors, il n’en reste pas moins qu’en appliquant le même jeu de 25 indicateurs qui vont de la qualité de l’eau à la gestion de la biodiversité en passant par la qualité de l’air ou les émissions de CO2, l’outil permet bien d’évaluer les positions relatives des pays au regard de leur performance environnementale.
La France se tire donc plus qu’honorablement de cet exercice. Mais l’autre enseignement du classement est que l’Europe dans son ensemble se distingue bien par sa performance environnementale notamment vis-à-vis de pays au développement économique comparable. A cet égard, comme le souligne le rapport de Yale, si les performances environnementales sont fortement corrélées avec la richesse des pays, cela ne suffit pas à expliquer la totalité de la performance d’un pays donné. Ainsi, en prenant comme référence les pays du G20, on s’aperçoit que les quatre pays européens qui en font partie surclassent les autres membres. Cette situation traduit bien le fait que depuis les années 70, l’Union européenne a fait de l’environnement une de ses politiques majeures en imposant des exigences fortes dans tous les compartiments de cette politique.
Face à ces bonnes performances deux attitudes sont possibles : soit considérer qu’en définitive, l’Europe en fait trop en matière d’environnement au regard de ses compétiteurs, soit au contraire se réjouir que les politiques qu’elle mène portent leurs fruits. Même en étant imperméable à tout argumentation sur le bien-être des générations futures ou sur la nécessité de préserver la terre, on devrait considérer qu’il y a bien un avantage comparatif à mieux gérer son environnement : une bonne partie de l’analyse faite par l’université de Yale repose sur les liens entre la santé humaine et l’environnement et il est difficile de soutenir que le développement économique peut se passer d’une population en bonne santé ! En ce sens, le classement de Yale fait partie des approches préconisées par le rapport Stieglitz-Sen-Fitoussi permettant de mesurer la performance d’un pays en dépassant une mesure uniquement par le PIB. Il y a donc en France et en Europe un capital environnemental qui a été conforté et développé par des politiques ambitieuses … il s’agit de le préserver et d’aller plus loin.
La protection de l’environnement et le développement durable bénéficient de la part du Traité d’un traitement particulier puisque l’article 11 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne indique que toutes les politiques de l’Union doivent les prendre en compte. La construction de l’identité européenne s’est faite sur cette vision du développement qui intègre la dimension environnementale. Cette vision n’est pas une vision « bruxelloise » mais au contraire elle apparaît avec constance dans les réponses des enquêtes d’opinion de l’Eurobaromètre . C’est ainsi que la dernière livraison de cette enquête indique que loin d’opposer politique environnementale et performance économique, les européens placent le développement d’une économie verte comme un des plus sûrs moyens de rebondir dans la crise économique que nous traversons.
Enfin, on soulignera qu’en dépit d’un référentiel juridique européen commun, les performances des pays de l’Union varient de façon substantielle entre la Suède (4e du classement) et Chypre (96e du classement). Cela reflète bien qu’au-delà des politiques européennes, les choix nationaux reposant sur des stratégies de développement nationales sont essentiels. L’Europe fixe un cadre minimal mais il appartient aux Etats d’une part de mettre pleinement en œuvre la politique de l’Union européenne mais aussi de faire mieux que ce minimum.
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