Police : il faudra forcément renouer avec la proximité! edit
Une police soucieuse du citoyen n'est pas une police molle, mais une police démocratique, légitime et plus efficace. Si une "police de proximité 2" semble nécessaire, sur quelles bases la construire?
La police de proximité est une vraie police au sens où elle assure des enquêtes judicaires, des prises de témoignages ou de plainte, ou encore des patrouilles. C'est bien ainsi qu'elle avait commencé à être mise en place en 1999. Elle opère en découpant le territoire en petits îlots ou secteurs, et en installant durablement ses locaux et ses personnels sur un secteur. Un chef de police de secteur coordonne l'ensemble des actions, au contraire des BAC, police secours ou police judicaire, qui s'y côtoient sans le savoir.
Elle n'apparaît pas comme une force d'occupation qui encercle le quartier, fait des raids ou envoie des drones pour savoir ce qui s'y passe, mais comme un service. La qualité de la police, sa dimension humaine pour le dire d'un mot, est une valeur dont on se rend mieux compte en allant des pays moins favorisés comme en Amérique du Sud par exemple.
La police de proximité est également une bonne idée pour tenter d'éviter les émeutes dans les villes. Il ne sert à rien de s'enfuir devant le policier de proximité : dès qu'il voit un enfant, il sait qui il est. Symétriquement, la proximité protège le policier : nul besoin de débauche d'analyse ADN pour qu'il reconnaisse les auteurs d'une violence à son encontre, ce qui la dissuade. Le fait qu'on s'en prenne aux policiers qui travaillent dans les banlieues, y compris comme à des boucs émissaires, n'est pas une fatalité. C'est devenu tellement courant qu'on s'y est habitué, mais chez nos voisins on n'attaque pas les postes de police, même dans les quartiers pauvres. Il n'y a donc pas de fatalité en la matière.
La police est touchée par la violence pour plusieurs raisons : elle incarne une forme d'autorité dans les quartiers défavorisés, elle s'oppose aux délinquants multirécidivistes ; elle n'a pas de stratégie de recherche de légitimité dans ces quartiers, utilise des méthodes de police légales, comme le contrôle d'identité en plaquant la personne au sol, qui sont vécues comme des humiliations appelant revanche. Sans réforme de la doctrine, on n'obtiendra pas d'amélioration à court terme. Une police dont l'autorité est fondée sur la force est une police faible, il serait utile d'en prendre conscience.
"La police de proximité 2" devra tenir compte des erreurs passées pour ne pas les renouveler, mieux articuler la police de service public et la recherche de légitimité avec l'interpellation.
1. Se donner le temps utile à la concertation avec les organisations représentatives et à la mise au point d'une réforme qui concerne une administration de 140 000 personnes, dont près de 80 000 en sécurité publique. Cette dernière a plus de deux fois la taille d'une entreprise comme Microsoft, c'est dire qu'il est nécessaire de réfléchir à des orientations stratégiques à moyen terme.
2. Définir une doctrine valant principes constitutionnels et non règlement tatillon : des règles générales devant être adaptées sur le terrain en fonction de la réalité du travail de police et non des règles devant s'imposer à toute force de manière uniforme.
3. Concentrer ses moyens sur les zones défavorisées, stabiliser les personnels et leur affecter des primes collectives et non individuelles.
4. Trouver des moyens supplémentaire en gagnant en cohérence (voire proposition 9) et en modifiant la taille des forces mobiles de sécurité, surdimensionnées en France et dont l'existence n'a pas empêché ni contenu des crises majeures comme les émeutes de 2005.
5. Faire les investissements immobiliers nécessaires : construire des hôtels de police peu nombreux, plutôt que des antennes nombreuses ouvertes à mi-temps.
6. Faire en sorte de réduire la discrimination : ne pas contrôler les jeunes plus souvent s'ils n'ont pas la bonne couleur de peau. Il faut faire réaliser des études indépendantes qui mesurent les progrès dans ce sens et éviter les actes vécus comme humiliants. Il s'agit d'utiliser le plus de discernement possible dans l'action de police. Il faudra aussi veiller à la diversité du recrutement sur des critères ethniques, à tous les niveaux de la hiérarchie.
7. Ne pas craindre de rendre des comptes aux citoyens, aux usagers locaux de la police ; au contraire, former les personnels à la recherche du contact et au moyen de le rendre utile pour toutes les activités de police, y compris répressives.
8. Combiner la recherche de contact avec la lutte contre les trafics et les caïds : c'est un point délicat qui implique la recherche d'équilibre entre les missions, et qui doit être trouvé localement en fonction du moment et du lieu.
9. Pour favoriser la cohérence à un niveau hiérarchique supérieur, il serait souhaitable de revoir l'organisation des services afin de placer tous les services (PJ, CRS, RG, sécurité publique) sous l'autorité d'un directeur départemental unique comme dans le cas de la gendarmerie.
10. Intégrer mieux l'action de la police avec les autres opérations des pouvoirs publics locaux, ce qui suppose de rechercher une manière durable de donner aux élus des grandes villes une autorité partagée sur l'emploi de la police de sécurité publique.
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