Ce que je crois edit
Négocier l’ouverture des échanges n’est pas la seule fonction de l’OMC, mais c’est manifestement l’une de ses fonctions essentielles. Cette fonction est incarnée par le Cycle du développement de Doha. Comme le Cycle de Doha n’a pas encore abouti, certains seraient tentés de dire que l’Organisation est en crise, que le multilatéralisme commercial ne fonctionne pas et que l’OMC a perdu toute pertinence. Ce sont, à mon avis, de simples raccourcis face à une réalité beaucoup plus complexe.
Selon moi, le débat porte non pas sur la pertinence de l’OMC, mais sur sa crédibilité. Et la crédibilité vient de la capacité de produire des résultats. Or, aujourd’hui, assurer l’ouverture commerciale multilatérale n’est pas une mince affaire.
L’ouverture des échanges et l’élaboration de règles multilatérales ont été perturbées par de profonds changements géopolitiques et économiques. L’ancien modèle à deux vitesses d’un monde divisé entre pays développés et pays en développement ne correspond plus aux réalités économiques actuelles. Un sérieux ajustement conceptuel s’impose. Nous devons trouver un nouvel équilibre entre la réciprocité et la flexibilité au sein d’un ensemble de Membres multidimensionnel si nous voulons assurer l’ouverture multilatérale du commerce.
Cette situation est compliquée par les considérations politiques à court terme qui deviennent de plus en plus incompatibles avec la fixation des objectifs à moyen et à long terme qui sont essentiels pour élaborer des politiques commerciales cohérentes.
L’ouverture des échanges a été compromise aussi par la plus grave crise économique depuis les années 1930, qui a fait des millions de chômeurs dans les économies avancées et qui nuit maintenant à la durabilité de la croissance des économies émergentes.
Je pense aussi qu’il est trop facile de dire que le multilatéralisme commercial ne fonctionne pas.
Nous avons vu le multilatéralisme commercial fonctionner à Hong Kong en 2005. Nous l’avons vu fonctionner avec l’adoption d’un mécanisme pour la transparence des accords commerciaux régionaux. Nous l’avons vu fonctionner avec la renégociation de l’Accord sur les marchés publics. Nous l’avons vu fonctionner avec la simplification des règles régissant l’accession des pays les moins avancés (PMA) à l’OMC. Et je suis convaincu que nous le verrons fonctionner à Bali avec la conclusion d’un accord sur la facilitation des échanges et sur certaines questions concernant le développement, les PMA et l’agriculture, et peut‑être même aussi l’ATI [Accord sur les technologies de l’information] 2.
Nous l’avons aussi vu fonctionner dans les négociations qui ont fait entrer onze nouveaux Membres dans la famille de l’OMC: de grandes économies comme la Russie, l’Arabie saoudite, le Viet Nam et l’Ukraine; de petites économies comme le Tadjikistan et le Monténégro; et cinq PMA — Samoa, Vanuatu, Tonga, Laos et Cap‑Vert. Et les perspectives sont bonnes pour le Yémen en septembre. Ensemble, ils représentent l’équivalent d’une économie de la taille de l’Allemagne.
Un message de prudence pour l’avenir: attention à ne pas créer de fracture entre les “MAR” — Membres ayant accédé récemment— et le reste des Membres, les premiers ayant des niveaux d’engagement plus élevés que les autres. Nous devons aspirer à un système commercial plus convergent.
J’entends souvent dire que la solution serait d’abandonner l’OMC et de passer simplement à des arrangements plurilatéraux ou régionaux. Mais nous avons vu le sort de certains de ces arrangements plurilatéraux comme l’Accord commercial anticontrefaçon ou le Système global de préférences commerciales entre les pays en développement. Nous savons aussi que, derrière le lancement à grand bruit de méga‑accords régionaux, comme certains les appellent, se cachent d’énormes difficultés et que, parfois, il n’y a même pas d’accord final comme cela a été le cas pour la Zone de libre‑échange des Amériques.
Que l’on ne se méprenne pas: je ne suis pas contre l’ouverture des échanges en dehors de l’OMC. Je pense que les arrangements plurilatéraux, les méga‑accords régionaux, et les accords régionaux, bilatéraux et unilatéraux PEUVENT contribuer à l’ouverture des échanges, et donc à l’égalisation des conditions du commerce mondial, qui doit rester notre objectif commun. Car c’est cela que signifie l’équité. Mais je pense que nous ferions bien de reconnaître que la question n’est pas d’ouvrir les échanges À L’INTÉRIEUR de l’OMC ou À L’EXTÉRIEUR de l’OMC. La question aujourd’hui est celle des difficultés que comporte l’ouverture des échanges. Les politiques commerciales nationales sont plus difficiles, et les accords commerciaux sont plus complexes, car la nature des obstacles au commerce a évolué. Nous ne négocions plus simplement la réduction des droits de douane, nous négocions aussi celle des obstacles non tarifaires, qui ont pris une importance considérable.
Les politiques commerciales nationales exigent un dialogue permanent avec la société civile et le public en général. Elles exigent aussi de placer le commerce dans le bon contexte: comme un instrument servant à générer de la croissance et des emplois. La politique commerciale et UN instrument, certes important, mais ce n’est pas LE seul. Et c’est un instrument au service du bien‑être de tous et non une arme contre le bien‑être.
Le fait que les obstacles non tarifaires sont en train de devenir le principal obstacle au commerce nous oblige à repenser la façon dont nous les abordons. Comment limiter l’effet négatif sur le commerce de mesures qui sont souvent prises pour protéger les consommateurs? C’est une question qui intéresse tous les Membres et dont la dimension n’a pas encore été sérieusement reconnue par cette Organisation. Si les mesures non tarifaires sont les principaux obstacles au commerce aujourd’hui et demain, nous devons faire en sorte que la manière dont elles sont traitées contribue à l’égalisation des conditions— et non à leur fragmentation. L’OMC n’est pas un organisme de réglementation pour la grande majorité des mesures non tarifaires, mais elle est bien placée pour devenir une plate‑forme à partir de laquelle la convergence de ces mesures pourra être suivie, à l’instar de ce que nous avons fait avec l’Aide pour le commerce.
Enfin, je pense vraiment que les critiques ont raison de dire que la conduite des négociations multilatérales pourrait être améliorée. Nous pourrions gagner beaucoup de temps dans le processus de négociation si, après une phase initiale de définition des objectifs à atteindre et des principes à observer, aboutissant à un mandat, le Secrétariat était chargé de mobiliser ses compétences pour présenter des propositions autour desquelles les négociations auraient lieu. Étant entendu que ce serait aux Membres de prendre la décision finale. C’est ainsi que procèdent d’autres organisations internationales.
Tout cela constitue de précieux enseignements pour le Programme de Doha pour le développement, qui est une promesse non tenue. Mais cette promesse devra être tenue si nous voulons corriger le déséquilibre de certaines de nos règles hérité du passé, à commencer par l’agriculture. Je pense qu’il n’y a pas d’autre issue que de parvenir à des résultats positifs dans le Cycle de Doha. De même qu’il n’y a pas d’autre issue que d’adapter le programme de Doha aux réalités actuelles. Pour cela, il faudra y ajouter de nouveaux éléments, des éléments qui exigent un traitement multilatéral, afin de mieux égaliser les conditions du commerce.
Si l’ouverture des échanges et l’élaboration de nouvelles règles commerciales sont essentielles pour assurer la crédibilité de l’Organisation, l’administration des règles existantes est également ce qui lui donne sa raison d’être. Comme le dit le proverbe: “le soleil est le meilleur désinfectant”.
Peut‑être parce que les Membres se concentrent depuis 1999 sur le pilier négociation de l’OMC, peut‑être parce que nous avons tous considéré que l’administration des règles existantes allait de soi, la réalité est que la fonction de surveillance de l’OMC laisse à désirer depuis quelques années. Les mandats en matière de notification et d’examen par les pairs sont bien là, mais leur exécution est quelque peu irrégulière, pour ne pas dire plus.
Mon sentiment est que la situation dans ce domaine s’est améliorée, même s’il y a encore fort à faire.
Des progrès ont été accomplis en matière de transparence des accords commerciaux régionaux, avec près de 100 accords examinés depuis 2006. Un nouveau suivi des mesures de politique commerciale a été mis en place en réponse à la crise de 2008. Le taux de notification aux comités s’est amélioré, grâce en partie à l’assistance technique fournie pour aider les pays en développement à s’acquitter de leurs obligations de notification, et grâce aussi à une meilleure utilisation de l’examen des politiques commerciales. Les comités se sont également employés à améliorer les examens par les pairs.
Et des progrès considérables ont été faits pour rassembler sous un même toit l’ensemble des renseignements sur les politiques commerciales grâce à la création d’I‑TIP (Portail intégré d’information commerciale). Pas plus tard qu’hier, nous avons dévoilé le nouveau module consacré aux services. I‑TIP offrira aux Membres un guichet unique permettant de télécharger facilement des données sur les mesures non tarifaires à travers l’ensemble des Accords de l’OMC et des données tarifaires et commerciales. Nous avons aussi commencé à travailler avec d’autres partenaires, tels que la CNUCED et la Banque mondiale, pour assurer l’utilisation plus cohérente de nos ressources dans ce domaine. En résumé, nous bénéficions maintenant d’une plus grande transparence et d’un accès plus simple à l’information commerciale.
Mais bien sûr nous pouvons et nous devons faire encore mieux: le taux de notification est encore trop faible, les examens par les pairs pourraient être plus efficaces et le portail I‑TIP aura encore besoin d’un investissement considérable pour devenir LE dépositaire de tous les renseignements de l’OMC sur les politiques commerciales.
Je vais maintenant parler du règlement des différends, l’autre grande fonction de l’OMC. Depuis septembre 2005, 58 groupes spéciaux ont été établis, dont 43 par le Directeur général. Le système de règlement des différends est solide et fonctionne bien. Le processus de réexamen du Mémorandum d’accord sur le règlement des différends a continué sur sa lancée mais, entre‑temps, sous l’impulsion du Directeur général adjoint M. Jara, des améliorations ont été apportées pour réduire les coûts d’administration du système. Nous sommes également très avancés dans la mise au point d’un registre numérique qui permettra d’engager des procédures par voie électronique.
Dans l’avenir, le principal défi en matière de règlement des différends sera de faire face aux pics d’activité, notamment au niveau de l’appel. Autre défi, la participation des pays en développement au règlement des différends. L’assistance technique, la formation et le soutien du Centre consultatif sur la législation de l’OMC sont essentiels, d’où mon engagement personnel en faveur du financement adéquat du Centre.
Enfin, je pense qu’il serait bon de recourir mieux et plus fréquemment aux bons offices, à la médiation et à l’arbitrage, qui sont tous prévus par les règles existantes. L’affaire des bananes est la seule dans laquelle ils ont été utilisés depuis 2005.
Je vais maintenant parler de la cohérence. Pour reprendre les termes d’un rapport de l’Organe d’appel, l’OMC n’est pas “isolée cliniquement”. Elle fait partie d’un système plus large de gouvernance mondiale, d’où l’importance d’assurer une cohérence dans l’élaboration des politiques économiques au niveau mondial.
Nous avons renforcé notre coopération avec le FMI et la Banque mondiale aux termes du mandat explicite pour la cohérence figurant dans l’Accord de Marrakech. Mais nous l’avons aussi sensiblement élargie avec beaucoup d’autres organisations, notamment celles de la famille des Nations Unies— et je voudrais rendre hommage au Secrétaire général de l’ONU et le remercier du soutien qu’il a toujours apporté à l’OMC et à moi personnellement –, et avec les banques régionales de développement et plusieurs organisations économiques régionales.
L’Aide pour le commerce, le Cadre intégré renforcé et le Mécanisme consultatif en faveur du coton sont de bons exemples de la cohérence en action. Non pas que nous ayons transformé l’OMC en un organisme de développement, non pas que nous ayons fortement accru les ressources du Secrétariat pour travailler dans ces domaines, non pas que nous ayons en quelque sorte laissé dériver notre mission. Nous avons plutôt utilisé notre pouvoir rassembleur, notre légitimité, notre notoriété et notre leadership dans le domaine commercial pour faire en sorte que le renforcement des capacités commerciales aille de pair avec l’ouverture des échanges. Et que les avantages de l’ouverture des échanges ne restent pas un espoir lointain pour beaucoup de nos Membres pauvres. Les nombreux exemples de résultats obtenus sur le terrain qui ont été présentés récemment lors du quatrième Examen global de l’Aide pour le commerce témoignent clairement de la sagesse collective dont nous avons fait preuve en lançant cette initiative en 2005. Et cette sagesse est à mettre en grande partie au crédit de la Directrice générale adjointe Mme Valentine Rugwabiza.
Mais il y a eu bien d’autres exemples de coopération et de renforcement de la cohérence: sur le financement du commerce; sur l’agriculture et la sécurité alimentaire dans le cadre de l’Équipe spéciale de l’ONU sur la sécurité alimentaire présidée par le Secrétaire général de l’ONU (et je voudrais saluer la contribution du Directeur général adjoint M. Harsha Singh à cet égard); sur le changement climatique avec le PNUE; sur la mesure du commerce en valeur ajoutée avec l’OCDE et bien d’autres; sur l’accès aux médicaments et à l’innovation médicale avec l’OMPI et l’OMS; sur les normes sanitaires et phytosanitaires dans le cadre du STDF; sur les mesures non tarifaires avec la CNUCED et l’ITC; sur l’emploi avec l’OIT.
L’OMC est également présente à la table du G‑20 et elle a présenté régulièrement des rapports sur le protectionnisme en matière de commerce et d’investissement et sur l’Aide pour le commerce. Et nous avons coopéré avec le système des Nations Unies dans le contexte des Objectifs du Millénaire pour le développement et du Programme de développement pour l’après‑2015. Enfin, pendant cette période, j’ai participé aux 16 réunions du Conseil des chefs de secrétariat des organismes des Nations Unies.
Mais, si importante que soit la cohérence entre les organisations internationales conduites par leurs membres, ce qui compte réellement, c’est la cohérence des membres. Et j’espère que l’on fera plus dans le domaine de la cohérence interne et dans d’autres domaines, comme la relation entre l’OMC et l’OIT. C’est à vous, bien sûr, que cette tâche incombe.
Il fut un temps où les négociations commerciales pouvaient être menées et les accords pouvaient être conclus et même appliqués en grande partie à l’abri des regards du public. Comme dit le proverbe français, « pour vivre heureux, vivons cachés ». Mais nos sociétés ne le permettent plus. Notamment parce que le commerce est politiquement sensible: tous ceux qui en bénéficient sont silencieux; ceux qui en souffrent font entendre leur voix, ce qui se comprend. Il faut écouter ces voix, car ce sont généralement celles des faibles, des travailleurs moins formés ou moins qualifiés, et souvent des femmes. Un examen public est inévitable. Il est de plus en plus nécessaire de dialoguer avec les parties prenantes et le public en général.
C’est pourquoi la participation des ministres et des capitales est décisive. Mais l’expérience montre que la collaboration avec les ministres et les ambassadeurs est une alchimie délicate. Si vous passez trop de temps avec les ministres, les ambassadeurs s’impatientent. Et si vous passez trop de temps avec les ambassadeurs, les ministres prennent leur distance, et il devient difficile de rallier leur soutien au moment voulu. Sur ce point, mon successeur devra trouver la bonne recette. La mienne n’a pas toujours fonctionné!
De grands progrès ont été accomplis dans l’interaction avec les parties prenantes et le public. Nous avons intensifié nos relations avec les petits pays Membres sans représentation à Genève. Cela a été grandement facilité par la mise en place d’une plate‑forme d’apprentissage en ligne, qui a vu le nombre de ses participants passer de 250 en 2005 à près de 5 000 en 2013. À la fin de 2012, 22 000 participants avaient bénéficié d’un apprentissage en ligne. C’est l’une des grandes réalisations de l’OMC dans le domaine de l’assistance technique au cours de ces huit années: un soutien plus intelligent, plus ciblé et plus économique.
Nous avons aussi élargi la communication avec les parties prenantes extérieures.
Nous avons considérablement renforcé notre dialogue avec les ONG, les entreprises et la société civile en général, aussi bien lors de mes visites aux Membres de l’OMC qu’ici à Genève, notamment grâce au Forum public, qui a attiré un nombre croissant de participants au fil des ans.
Nous avons développé nos contacts avec les parlementaires, pour lesquels nous avons élaboré un bulletin d’information régulier et organisé des séminaires locaux et régionaux, afin de les informer des questions relatives au commerce.
Et nous avons renforcé nos relations avec les universitaires, en particulier ceux des pays en développement, grâce à la création des chaires de l’OMC et du prix décerné aux jeunes économistes, et grâce à la restructuration des centres de référence de l’OMC.
Enfin, nous nous sommes efforcés de rester proches du grand public en réorganisant le site Web de l’OMC, qui est jugé de grande qualité, en entretenant des relations avec les médias du monde entier, en intensifiant nos efforts d’assistance technique et de communication et en lançant des initiatives comme la Journée portes ouvertes, qui ont rapproché l’Organisation de son environnement immédiat à Genève.
Toutes ces initiatives ont permis de repositionner l’OMC au sein de la gouvernance économique mondiale et ont amélioré la visibilité et l’image de l’Organisation.
Mais cette tâche est loin d’être achevée. L’OMC, avec son site unique à Genève et ses ressources très limitées, ne peut remplacer une communication active de la part de ses Membres. À plus long terme, la communication sera essentielle pour soutenir la légitimité d’une institution dont la mission centrale— réduire les obstacles au commerce— l’amènera à se pencher sur des mesures non tarifaires davantage fondées sur des valeurs et donc politiquement plus sensibles.
Trois adjectifs me viennent à l’esprit quand je pense au Secrétariat de l’OMC: petit, sobre et hyper compétent. Avec ses 650 fonctionnaires, le Secrétariat est tout petit par rapport aux organisations sœurs, dont l’effectif atteint des milliers. Mais il possède une incroyable réserve de compétences mises au service des Membres.
Mon objectif a été de moderniser le Secrétariat en y apportant des changements pour l’adapter à l’évolution des circonstances, mais aussi d’accroître son efficacité et d’optimiser l’utilisation des ressources. Car, en fin de compte, nous sommes une organisation financée par les contribuables. Je tiens à remercier, en passant, ceux d’entre vous qui ont contribué à ce que vos capitales règlent leurs arriérés, ce qui n’a certainement pas été une tâche facile! Elle n’est pas achevée, mais un grand pas a été fait.
Je ne détaillerai pas les changements qui ont été opérés dans la gestion des ressources. Ils ont fait l’objet d’un rapport distinct qui vous a été présenté. Je souhaite plutôt insister sur l’importance pour le Secrétariat d’assurer un leadership intellectuel dans le domaine du commerce.
Cela signifie qu’il faut stimuler la recherche et encourager la réflexion et la publication. Je pense que beaucoup de choses ont été faites dans ce domaine, et elles sont à mettre au crédit des membres du personnel. La recherche sur le commerce en valeur ajoutée, les travaux sur les chaînes de valeur, l’analyse des accords commerciaux régionaux, la préparation des examens des politiques commerciales, les rapports sur le commerce mondial, l’assistance aux groupes spéciaux et à l’Organe d’appel, la liste est longue. L’OMC est aujourd’hui LA référence pour ce qui est des connaissances sur le commerce.
Mais nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers. Le Secrétariat doit continuer à regarder vers l’avenir, à s’imprégner des nouvelles questions et à analyser les obstacles futurs au commerce. Et pour cela, il faudra créer des réseaux avec les Membres et les autres parties prenantes. Les fonctionnaires du Secrétariat sont pour vous un précieux atout. Continuez à investir dans cette ressource. Et réfléchissez à la manière dont vous pourriez mieux exploiter son potentiel, comme le suggère le rapport du Groupe de réflexion sur l’avenir du commerce que j’ai convoqué l’an dernier. Je peux vous garantir que la neutralité et l’indépendance sont profondément ancrées dans les valeurs du Secrétariat. C’est pourquoi il mérite encore plus votre confiance.
J’arrive au terme de ma déclaration et je pense que le moment est venu de regarder vers l’avenir.
Ces huit années ont vu l’édification d’une institution plus forte. Et je ne parle pas seulement de la rénovation des locaux. Nous avons maintenant une institution, ce qui est plus qu’une organisation. Au‑delà des avantages qu’elle procure à ses Membres, l’OMC, en tant qu’institution, est un atout en soi, un bien public mondial que chacun de ses Membres doit entretenir. Bien entendu, le Directeur général représente le système et doit toujours veiller au système. Mais il n’est pas pensable que le Directeur général “vive sur Vénus”, la planète du bien public mondial, et que les Membres “vivent sur Mars”, la planète où ils se battent pour défendre leurs intérêts individuels. Vous devez voir plus loin que vos intérêts et prendre soin de cette institution, tant comme propriétaires que comme parties prenantes.
Au cours de ces huit années, j’ai également observé que l’économie politique de l’ouverture des échanges était mieux intégrée dans un ensemble de politiques nationales et internationales. C’est un grand pas en avant pour relever le défi de la “convergence”, si bien décrit dans le rapport sur l’avenir du commerce mondial. Le soutien à un commerce plus ouvert ne pourra durer que si l’on assure une plus grande équité entre les gagnants et les perdants de l’ouverture des échanges. Et aussi une plus grande convergence sur les préférences fondées sur des valeurs qui sont à l’origine des différences concernant les mesures non tarifaires. C’est là un défi pour l’avenir.
(Ce texte reprend l'essentiel du discours d'adieu de Pascal Lamy, prononcé devant le Conseil général de l'OMC le 24 juillet dernier)
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