Un G16 plutôt qu’un simple G8 edit
Les années 1980 ont connu le tournant de la deuxième grande mondialisation économique de l’histoire. Il ne faudrait pas qu’elle se termine comme celle du dix-neuvième siècle. Crises économiques et guerres vont souvent de pair. Le premier choc énergétique de 1973, le tournant des réformes économiques en Chine à la fin des années 1970 puis celles de l’Inde et enfin la chute du mur de Berlin en 1989, ont progressivement conduit à un bouleversement économique de la planète. L’idée de réunir un G7 ou G8 sous le format actuel est clairement inadaptée lorsqu’on voit les nuages s’amonceler sur les pays émergents, Chine et Inde comprises.
Les marchés du travail dans le monde, ceux des biens et services, ceux des ressources naturelles, y compris notre environnement, et enfin ceux des capitaux ont soudain conquis un espace et un volume sans précédent. Or face à ce « flat world », les mécanismes de régulation sont eux restés « à plat » et dominés très largement encore par les pays les plus développés dont le poids démographique et économique mondial ne cessait de reculer.
La crise actuelle n’est pas qu’une crise financière. Encore moins celle des seuls Etats-Unis comme on le lit souvent. La prise de conscience d’une Europe économique et politique inachevée comme la contagion progressive de la crise à l’ensemble des émergents le montrent bien. La crise est fondamentalement l’expression de l’émergence d’un « Nouveau Monde » qui n’est pas reconnu sur le plan institutionnel. Partie d’une bulle spéculative face à des marchés peu régulés au plan international, sans compter les places-casinos offshore livrées à la spéculation incontrôlée, elle laisse pour l’essentiel les Etats paralysés dès lors qu’ils sont divisés. Notamment, les Etats les plus influents de la planète ne se concertent pas assez sauf au sein d’un club de pays riches de moins en moins pertinent et trop anglo-saxon dans sa vision du monde.
La création du G6 en 1975 au château de Rambouillet a précisément suivi le choc énergétique de 1973 et les désordres monétaires mondiaux qui ont suivi l’abandon des parités de change fixes. Mais de crise en crise, il est devenu de plus en plus évident que si ce format informel peut être fécond, son orientation et son efficacité souffrent d’un manque évident de représentation.
La crise actuelle est déjà la deuxième du vingt-et-unième siècle. On voit bien que ces crises à répétition appellent une nouvelle architecture mondiale autour des grandes agences internationales existantes comme la BIRD, l’OMC, le BIT ou encore à créer (comme dans l’environnement même si le GIEC peut à court terme jouer ce rôle puisque le changement climatique est une des grandes menaces du vingt-et-unième siècle). En l’absence d’un gouvernement mondial, il serait également indispensable d’avoir un petit groupe de pilotage informel autour des plus grands acteurs continentaux ou représentatifs du Nouveau Monde : Etats-Unis, Union Européenne, Japon, Chine, Russie, Inde, Brésil, Afrique du sud et Arabie saoudite. A ces responsables devraient enfin s’ajouter trois ou quatre représentants du monde des ONG comme elles savent les coopter de plus en plus lors des grands sommets internationaux.
Il s’agirait au total d’une quinzaine d’interlocuteurs réunis autour d’une table pour échanger leurs visions des problèmes économiques mondiaux, jouer un rôle d’impulsion aux côtés des grandes institutions internationales toujours plus lentes à manœuvrer, et enfin diffuser de la confiance collective dans un monde de plus en plus proche à défaut d’être solidaire.
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