Joe Biden peut-il être réélu? edit
Un sondage du New-York Times/Sienna College (25-28 février, 980 personnes interrogées) confirme que Donald Trump est aujourd’hui le favori de la prochaine élection présidentielle. En l’espace de deux années, les intentions de vote en sa faveur sont passées de 41% contre 44% pour Biden, à 48% contre 43% pour Biden. Il semble pouvoir conserver en 2024 l’ensemble de son électorat de 2020 (97%) et prendre à Biden 10% du sien. Pourtant, certaines données de ce même sondage montrent que l’élection n’est pas encore jouée.
Les faiblesses de Biden
Du point de vue de la sociologie des électorats le principal handicap du président sortant est le fort soutien à Trump du segment majeur de l’électorat constitué des électeurs blancs sans diplômes (tableau 1). Près des deux-tiers d’entre eux, ce qui représente 38% de l’ensemble, ont en effet l’intention de voter pour l’ancien président.
Tableau 1. Intentions de vote à l’élection présidentielle de 2024 selon la « race » et le niveau d’études (« college » : études supérieures)
D’une manière générale, les autres variables sociologiques classiques n’introduisent pas de différences très sensibles au niveau du vote. La variable total household income taxes n’en produit aucune tandis que la variable de sexe n’en produit qu’une faible : si les hommes votent à 49% pour Trump et 40% pour Biden, les femmes votent dans les mêmes proportions pour les deux candidats (46%). L’effet « avortement » est donc plus faible chez elles qu’attendu.
Du point de vue des politiques menées par les deux présidents, Trump remporte un avantage décisif (tableau 2). Les Américains estiment que les politiques de Trump les ont aidés plutôt qu’elles ne leur ont nui (« hurt »), tandis que celles de Biden leur ont nui plutôt qu’elles ne les ont aidés. Plus grave encore, tandis que 74% des électeurs de Trump estiment que ses politiques les ont aidés, seulement 39% des électeurs de Biden font la même réponse s’agissant de ses politiques. De même, les électeurs de Biden disent moins avoir souffert des politiques de Trump que les électeurs de Trump de celles de Biden.
Tableau 2. Jugements sur les politiques menées par Trump et Biden selon l’intention de vote présidentiel
Ces adhésions différentes à l’action des deux présidents trouvent leur traduction au niveau du degré d’attachement des électeurs à leur candidat (tableau 3).
Tableau 3. Réactions aux hypothèses de victoire de Biden et de Trump aux primaires selon l’intention de vote présidentiel chez les votants aux primaires démocrates et républicaines
56% des électeurs de Trump qui ont voté ou vont voter aux primaires républicaines seraient enthousiastes en cas de sa nomination comme candidat à la présidence de la République. Ce serait le cas, s’agissant de la nomination de Biden, d’un quart seulement de ses électeurs votant aux primaires démocrates. Chez ces derniers 28% seraient même insatisfaits ou en colère, contre 7% des électeurs de Trump. Le candidat républicain est ainsi porté par son électorat contrairement au candidat démocrate. Il s’agit là pour ce dernier d’un handicap sérieux.
Cette différence entre les deux candidats semble due pour une large part à l’âge des candidats et surtout à la manière dont il est perçu par les électeurs. Bien que la différence d’âge entre les deux candidats soit faible objectivement, quatre années, les 81 ans de Biden sont jugés autrement que les 77 ans de Trump (tableau 4).
Tableau 4. Biden et Trump sont-ils trop vieux pour être des présidents efficaces ? (selon l’intention de vote présidentiel)
Les Américains, y compris les électeurs de Biden eux-mêmes, estiment que celui-ci est trop vieux pour être un président efficace, ce qui n’est pas l’opinion des électeurs de Trump à l’égard de leur candidat. Du coup, la question de l’âge du président sortant est devenue un handicap de première importance pour le parti démocrate.
La partie n’est cependant pas jouée
Toutes ces données placent Trump en position de favori pour la prochaine élection présidentielle. Cependant, certaines autres données du même sondage autorisent à penser que la partie n’est pas encore jouée. Si l’on prend en compte d’autres jugements des électeurs sur les deux probables candidats, Biden fait mieux que tenir tête à son adversaire (tableau 5). La majorité des électeurs estiment ainsi que Biden a la personnalité et le tempérament nécessaire pour être un président efficace. Ce n’est pas le cas de son adversaire. Notamment, ses électeurs partagent massivement cette opinion, plus fréquente chez eux que celle des électeurs de Trump à l’égard de leur candidat.
Tableau 5. Biden et Trump ont-ils la personnalité et le tempérament nécessaires pour être des présidents efficaces ? (selon l’intention de vote présidentiel)
Par ailleurs, si la presque totalité des électeurs de Biden estiment que Trump a commis des crimes fédéraux, c’est également le cas d’un cinquième des électeurs de Trump (tableau 6). Certes, cette opinion ne semble pas pour l’instant amener ces électeurs à changer leur intention de vote mais, au cours de la campagne, les aspects criminels de la personnalité de l’ancien président peuvent constituer une fragilité réelle.
Tableau 6. Trump a-t-il commis des crimes fédéraux ? (selon l’intention de vote présidentiel)
Enfin, la question ukrainienne, même si elle n’intéresse pas les Américains au premier chef, sera présente dans la campagne avec notamment l’enjeu des livraisons d’armes. Or, si Trump semble demeurer résolument un allié de Poutine, Les électeurs sont en majorité favorables au soutien à l’Ukraine. Chez les électeurs de Trump eux-mêmes 41% partagent cette attitude (tableau 7).
Tableau 7. Attitudes à l’égard du soutien à l’Ukraine selon l’intention de vote présidentiel
Ainsi, bien que Trump ait pris actuellement un net avantage sur Biden, le déroulement de la campagne présidentielle pourrait jouer un rôle décisif dans la répartition finale des votes.
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