Trois leçons des législatives edit
Le premier tour des élections législatives apporte deux enseignements majeurs : la confirmation de la tripolarisation électorale apparue au premier tour de l’élection présidentielle et un succès politique de Mélenchon et de la NUPES.
Comme le montre le tableau 1, la nouvelle tripolarisation, apparue au premier tour de l’élection présidentielle, confirme son enracinement au premier tour des élections législatives : 25,8% pour le pôle central, 25,7% pour le pôle d’extrême-gauche et 22,9% pour le pôle d’extrême-droite (Tableau 1). Cette tripolarisation s’est établie par les processus suivants.
La gauche, qui représentait 42% en 2012 et s’était effondrée en 2017, demeure stable en 2022. Le pôle central perd sept points en 2022 par rapport à 2017 et, il s’agit de l’évolution la plus nette, le pôle d’extrême-droite, resté stable autour de 13% entre 2012 et 2017, connaît une forte progression en 2022, doublant presque sa proportion de suffrages exprimés et le mettant au niveau des deux autres pôles. Cette progression s’effectue au détriment de la droite LR, déjà en forte baisse en 2017 et qui poursuit sa chute en 2022. Cette chute est néanmoins freinée par rapport au premier tour de l’élection présidentielle.
Tableau 1. Résultats du premier tour des élections législatives de 2012, 2017 et 2022
La comparaison des résultats de la présidentielle et des législatives en 2022 fait ressortir une baisse de cinq points de la NUPES par rapport aux scores présidentiels des candidats des partis qui l’ont formée au lendemain de l’élection présidentielle. Le score d’Ensemble est en recul de deux points et celui de l’extrême-droite (RN et Reconquête) est en recul net de près de huit points, semblant avoir particulièrement pâti de l’augmentation de l’abstention entre les deux élections (Tableau 2).
Tableau 2. Résultats du premier tour de l’élection présidentielle et des législatives de 2022
Le premier tour a constitué un succès politique important pour Jean-Luc Mélenchon et la NUPES. Certes, celle-ci a reculé par rapport à la gauche présidentielle, phénomène dû au fait que, selon un sondage Harris Interactive, une moitié des électeurs qui ont voté pour un candidat de gauche autre que Mélenchon n’ont pas voté pour la NUPES. Néanmoins, Mélenchon a pu rassembler sous l’ombrelle de la NUPES l’écrasante majorité des électeurs de gauche, montrant que dans ce camp l’envie d’union l’emportait sur les divisions partisanes. Il s’impose désormais comme le chef de la gauche et son succès, d’autant plus important qu’il n’existe plus de gauche partisane en dehors de la NUPES, peut conforter l’alliance des partenaires de cette union malgré les différends qui les opposent. En outre la NUPES sera présente au second tour dans un nombre de circonscriptions équivalent à celui des macronistes, autour de 400, et une petite moitié des duels verront s’opposer les candidats de ces deux formations. Enfin, la NUPES sera de loin le groupe d’opposition le plus important dans la nouvelle assemblée. Mélenchon a ainsi réussi à installer l’idée que tout se joue désormais entre la NUPES et Ensemble, même s’il semble exclu qu’il puisse être majoritaire dans cette assemblée.
En revanche, bien que le bloc Ensemble ait les plus grandes chances d’être le groupe le plus important dans la nouvelle assemblée, les candidats macronistes en 2022 n’ont pas profité d’un effet de souffle comme ce fut le cas en 2017 puisqu’ils avaient obtenu alors 32% contre 24% pour Macron (tableau 3). Au contraire, en 2022, Ensemble a reculé de deux points sur les suffrages exprimés par rapport au score du président sortant. Dans ces conditions, les macronistes paraissent aujourd’hui sur la défensive face à une gauche à l’offensive. La conservation d’une majorité absolue est rien moins que certaine.
Tableau 3. Résultats du premier tour de l’élection présidentielle et des législatives de 2017
Précisons enfin que, du fait de la règle des 12,5% des inscrits nécessaires pour être qualifié pour le second tour, comme en 2017, il n’y aura pratiquement que des duels (une triangulaire en 2017 et huit en 2022).
Une abstention législative toujours très élevée
L’abstention au premier tour des élections législatives a atteint en 2022son plus haut niveau sous la Ve République, 52,5%. Cette forte abstention, comme le montre le tableau 4, s’explique principalement par le fait que les élections législatives ont lieu au lendemain de l’élection présidentielle. Jusqu’à l’établissement du quinquennat présidentiel et l’inversion du calendrier électoral en 2002, l’abstention aux élections législatives était déjà beaucoup plus élevée lorsque les élections législatives avaient lieu dans la foulée de la présidentielle comme ce fut le cas en 1981 et en 1988 que lorsqu’elles se tenaient hors élection présidentielle. À partir de 2002, alors que les élections législatives ont toujours eu lieu depuis lors au lendemain de l’élection présidentielle, cette abstention n’a fait que croître régulièrement, passant de 35,6% en 2002 à 52,5% en 2022. À partir de 2007, l’écart de l’abstention aux deux types d’élections a été supérieur à vingt points. Les élections législatives sont devenues ainsi « la queue de comète » de l’élection présidentielle.
Tableau 4. Évolution de l’abstention entre les élections législatives et l’élection présidentielle précédente depuis 1965 (premier tour)
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